Trop tôt, pas mûrs…

Dans lequel nous apprenons qu’à vouloir le Royaume pour tous, tout de suite, nous sommes source d’injustice et de violence. Nul ne connaît le jour, ni l’heure.

Textes :           Actes 4, 32-37 ; 5, 1-11
                           Apocalypse 20,13

Autel du mensonge, Basilique St Pierre, Rome

Voilà, frères et sœurs, ce qui s’est passé. Vous le savez, la communauté que j’avais fondée à Jérusalem rendait un culte véritable au Seigneur. Tous, nous étions touchés par la grâce. Je n’ai pas supporté que la mesquinerie et le manque de foi viennent ébrécher cette sainte communion.

Il m’est revenu qu’un couple, Ananias et Saphira, avait vendu un bien et avait amené le montant de la vente au trésorier, comme le faisaient tant de frères et sœurs. Cependant, ils avaient gardé une partie pour eux. En apprenant cela, la colère s’est emparée de mon cœur. Je les ai convoqués séparément, sous un prétexte fallacieux.

A ma grande honte, je dois vous avouer que j’ai utilisé au service du mal le don de parole que le Seigneur m’avait confié pour faire le bien. J’ai exposé leur prostitution et leur hypocrisie aux yeux de toute la communauté. Aucun procureur romain ne sera jamais aussi éloquent et impitoyable que je ne le fus ce jour-là.

L’assemblée, sous l’effet de mes paroles, s’est transformée en un clin d’œil en foule enragée, la même foule que celle qui a crucifié notre Seigneur.  La communion d’Esprit s’est évaporée en un tournemain. Sous les coups, les insultes et les crachats, Ananias, puis Saphira, sont partis à jamais.

Dès cet instant, la joie a disparu, et tous se regardaient dans la crainte l’un de l’autre. Je le dis à ma grande honte, ce ne sont pas Ananias et Saphira qui ont brisé la communion, c’est moi.

Mes démons s’appellent : orgueil et impulsivité. J’agis toujours avant de prier et de réfléchir. Je veux le Royaume ici, tout de suite ! Quel bonheur, quelle joie, de voir que ma petite communauté, fécondée par l’Esprit, avait mis en œuvre les préceptes de Jésus ! J’avais oublié que ces moments de grâce sont toujours passagers, surtout quand ils sont collectifs, que les soucis du monde réclament leur dû une fois l’euphorie passée. Saphira et Ananias n’étaient bien évidemment pas possédés par le diable ; ils étaient humains, voilà tout. J’ai projeté sur eux ma frustration, ma colère de voir mon rêve brisé. J’ai voulu faire un exemple, et je les ai expulsés de la communauté en les diabolisant aux yeux de leurs frères et sœurs. C’est moi, Pierre, qui était sous la coupe de Satan, ce jour-là.

Mes frères, je vous supplie de me pardonner une fois encore. J’aimerais par-dessus tout que de ce faux pas vous fassiez témoignage, pour qu’il serve de leçon aux humains. Toi, Luc, si doué pour dénoncer la violence sans condamner son auteur, écris, mon frère. Ecris, et que les gens qui te liront restent aveugles et sourds jusqu’au jour du Jugement. Qu’ils s’émerveillent de ma justice, et qu’ils haïssent Ananias et Saphira pour leur avoir volé le Royaume. Un jour, nous serons mûrs pour la moisson, et ce jour-là ta prophétie, Jean, s’accomplira :

La mer rendit ses morts,
la mort et l’Hadès rendirent leurs morts,
et chacun fut jugé selon ses œuvres.

Crédit photo : Wikimedia, CC BY-SA 3.0

#BalanceTonTort

Il est plus que temps de traduire la Bible en écriture inclusive. Je donne l’exemple.

Texte :             Matthieu 23, 1-13 ; 24-36

Alors Jésus s’adressa aux foules et à ses disciples : « (Les scribes et les Pharisiens)·Hervé siège·nt dans la chaire de Moïse : faites donc et observez tout ce qu’il·s peu·ven·t vous dire, mais ne vous réglez pas sur leurs·ses actes, car ils di·sen·t et ne font·ait pas. 

Il·s lie·nt de pesants fardeaux et les met·tent sur les épaules des hommes, alors qu’eux·lui-même·s se refuse·nt à les remuer du doigt. Toutes leurs·ses actions, il·s les font·ait pour se faire remarquer des hommes. Il·s élargi·ssen·t leurs·ses phylactères et allonge·nt leurs·ses franges. Il·s aime·nt à occuper les premières places dans les dîners et les premiers sièges dans les synagogues·églises, à être salué·s sur les places publiques et à s’entendre appeler “Maître” par les hommes. 

Pour vous, ne vous faites pas appeler “Maître”, car vous n’avez qu’un seul Maître et vous êtes tous frères. 

N’appelez personne sur la terre votre “Père”, car vous n’en avez qu’un seul, le Père céleste.

Ne vous faites pas non plus appeler “Docteurs”, car vous n’avez qu’un seul Docteur, le Christ. 

Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. 

Quiconque s’élèvera sera abaissé, et quiconque s’abaissera sera élevé. 

Malheureux êtes·es-vous·tu, (scribes et Pharisiens)·Hervé hypocrite·s, vous·toi qui ferme·z devant les hommes l’entrée du Royaume des cieux ! Vous·toi-même·s en effet n’y entre·z pas, et vous·tu ne laisse·z pas entrer ceux qui le voudraient ! [ 14-23] 

Guide·s aveugle·s, qui arrête·z au filtre le moucheron et avale·z le chameau ! Malheureux êtes·es-vous·tu, (scribes et Pharisiens)·Hervé hypocrite·s, vous·toi qui purifie·z l’extérieur de la coupe et du plat, alors que l’intérieur est rempli des produits de la rapine et de l’intempérance. Pharisien·Hervé aveugle ! purifie d’abord le dedans de la coupe, pour que le dehors aussi devienne pur. 

Malheureux êtes·es-vous·tu, (scribes et Pharisiens)·Hervé hypocrite·s, vous·toi qui ressemble·z à des·un sépulcre·s blanchi·s : au-dehors il·s ont·a belle apparence, mais au-dedans il·s sont·est plein·s d’ossements de morts et d’impuretés de toutes sortes. Ainsi de vous·toi : au-dehors vous·tu offrez·s aux hommes l’apparence de·u juste·s, alors qu’au-dedans vous·tu êtes·es rempli·s d’hypocrisie et d’iniquité. 

Malheureux, (scribes et Pharisiens)·Hervé hypocrite·s, vous·toi qui bâtis·sez les sépulcres des prophètes et décore·z les tombeaux des justes, et vous·tu di·te·s : “Si nous·j’ avions·ais vécu du temps de nos·mes pères, nous·je n’aurions·ais pas été leur·s complice·s pour verser le sang des prophètes.” Ainsi vous·tu témoigne·z contre vous·toi-même·s : vous·tu êtes·es le·s fils de ceux qui ont assassiné les prophètes ! Eh bien ! vous·toi, comble·z la mesure de vos·tes pères ! 

Serpent·s, engeance de vipères, comment pourriez·ais-vous·tu échapper au châtiment de la géhenne ? 

C’est pourquoi, voici que moi, j’envoie vers vous des prophètes, des sages et des scribes. Vous en tuerez et mettrez en croix, vous en flagellerez dans vos synagogues et vous les pourchasserez de ville en ville, 

pour que retombe sur vous tout le sang des justes répandu sur la terre, depuis le sang d’Abel le juste jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez assassiné entre le sanctuaire et l’autel. 

En vérité, je vous le déclare, tout cela va retomber sur cette génération.

Désolé si c’est un peu pénible à lire. N’est-ce pas un prix acceptable à payer pour la vérité ? De toute évidence, celle-ci n’est déjà pas très déchiffrable en soi, si j’en juge par ma·notre difficulté à me·nous reconnaître dans les cibles des discours violents de Jésus. Le mal c’est l’Autre, voilà qui restera toujours plus confortable.

Les trois derniers versets ont l’air particulièrement vengeurs, mais en fait ils sont une bénédiction. Cette génération, la nôtre, est la première à dévoiler la réalité de notre violence. C’est certes une prise de conscience assez pénible à vivre, mais elle est salvatrice.

Nous sommes tous des figuiers stériles

Où il est question d’un pauvre figuier qui n’avait fait de tort à personne.

Textes :    Marc 11,12-14 ; 20-26
                    Luc 13, 6-9
                    Isaïe 53

Ce jour-là, j’étais anxieux, irascible. Jésus est venu s’asseoir à côté de moi et il m’a pris la main.

« Quelle est la raison de ton angoisse ? » m’a-t-il demandé.

« C’est ce que tu nous as dit tout à l’heure », répondis-je.

« Que vous ai-je dit ? »

« Que notre regard sur l’Autre était faussé, et que nous étions incapables de reconnaître que ce que nous lui reprochons, nous nous en rendons nous-mêmes coupables. »

« Pourquoi est-ce si dur à entendre ? »

« Parce que c’est vrai. La parabole que tu as utilisée, cette histoire de figuier stérile, m’a ouvert les yeux. Je me suis souvenu que pas plus tard qu’hier, j’avais jugé et rejeté un compagnon parce qu’il avait été grossier et agressif. Tes paroles m’ont fait comprendre qu’il était dans le même état d’esprit que moi en ce moment. J’aurais dû voir que ce n’était pas par malice qu’il était agressif et désagréable, mais parce qu’à ce moment-là il était incapable de donner du fruit. J’aurais dû l’arroser et lui donner de l’engrais, pour le relever, l’aider à sortir de sa nuit. Au lieu de cela, je l’ai maudit, je l’ai desséché. » Je baissai la tête.

« C’est souvent ce que nous nous faisons les uns aux autres… », dit Jésus doucement.

« Oui, et c’est parce que j’ai compris cela que je suis triste et désorienté ». Nous restâmes silencieux pendant quelques minutes, puis Jésus dit :

« Plus tard, tu témoigneras de ce que tu as appris aujourd’hui ».

« Oui, Seigneur, je témoignerai », répondis-je.

« Quand tu témoigneras, tu diras que c’est moi qui ai maudit le figuier. »

J’étais choqué, scandalisé ! je me suis levé et j’ai dû crier sous le coup de l’émotion :

« Mais pourquoi ? Ça n’a pas de sens ! C’est toi qui nous ouvres les yeux, c’est toi qui nous apprends à aimer ! Jamais je n’accepterai de salir ton nom ! »

Il dit : « Plus tard, tu comprendras. Saches qu’il est nécessaire que je sois compté parmi les méchants, afin que les écritures s’accomplissent. Je te demande de faire cela pour qu’en lisant ton témoignage, ils restent aveugles et sourds jusqu’aux temps de la moisson. Ainsi, le jour où ils cesseront d’adorer mon image pour enfin écouter ma Parole, celle-ci les atteindra, comme elle t’a atteint aujourd’hui. »

Crédit photo : Max Pixel, CC0